L’efficacité dans l’entreprise

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Auteur

Patrick Probonas

Date de publication

11/16/2021

Le sujet de l’efficacité dans l’entreprise ne déclenche pas, en règle générale, de débat passionné. Tout le monde partage la vision dynamique de sa mise en œuvre : Des actions rapides et précises, des résultats tangibles et attendus, des comportements concentrés et engagés. Fermez le ban !

Mais, l’affaire est-elle si simple ? Souvenons-nous : l’humain est complexe. La compréhension du fonctionnement d’un groupe ne se satisfait jamais de raccourcis trop rapides. Malgré son caractère évident, la notion d’efficacité est rarement observée dans une perspective de fonctionnement global.

L’efficacité dans l’entreprise n’est pas toujours la priorité…

En revanche, dans de nombreux cas, en entreprise et ailleurs, le but semble consister à accumuler les causes de ralentissements.  Cela concerne la production de richesses matérielles ou le développement humain. Pourquoi, parce que nos cadres dirigeants sont structurellement formés à acquérir du pouvoir plutôt qu’à privilégier l’efficacité. Ils se penchent rarement sur la question de l’efficacité professionnelle sur un plan collectif.

A leur décharge, ils ont hérité d’une vision théorique et normée d’un type d’efficacité spécifique. Celle-ci, enserrée dans des tableurs possédant leur langage propre, privilégie la vision financière du monde des affaires. Pourtant, se frotter à la réalisation concrète de l’efficacité est autrement plus complexe. Ces cadres ignorent, pour les plus nombreux, comment elle s’exprime en fonction du milieu.  Comment elle influe sur les interactions humaines et s’en nourrit. Ses composantes organisationnelles, alimentées par son énergie et sa capacité à produire des résultats incomparables, méritent d’être regardées.

Une définition de l’efficacité dans l’entreprise

Exécuter des tâches ciblées pour atteindre des objectifs rentables grâce à des moyens optimisés, une dépense d’énergie minimum et dans un délai court.

Cette définition ne concerne pas l’efficacité personnelle au service de soi-même, celle qui sert à grimper les échelons, à faire carrière ou accumuler des avantages divers. Il y a des spécialistes pour ce type d’exercice. Je parle bien ici de l’efficacité systémique de groupe : Elle s’applique

  • A tous les sujets de production de richesses, qu’ils soient financiers, commerciaux ou industriels.
  • Elle concerne la cohérence des discours et des comportements à tous les niveaux.
  • Elle conditionne la capacité de réaction rapide d’une entité aux interactions innombrables, internes et externes.
  • Elle intervient sur les méthodes de travail et les types de management.

Une règle : L’efficacité naît de l’animation d’une volonté (je veux faire) Cette base de départ, une fois partagée, va se ramifier et s’appliquer selon les diverses disciplines, expertises et objectifs de l’entreprise pour générer un résultat d’excellence.

Cela implique l’élaboration d’un environnement de travail simple à appréhender et, dans le même temps, délicat à réaliser.

Les bonnes personnes aux bons postes

Les bonnes personnes aux bons postes sont nécessaires. Des gens aptes à exécuter les métiers de l’entreprise concernée. Ce fait pose la question de leur disponibilité. S’ils travaillent déjà en interne et démontrent chaque jour leur savoir-faire, leur direction déploiera des efforts d’attention, pour les garder.

En conséquence, c’est là qu’interviennent des moyens des ressources humaines. Elles prennent en compte des compétences clés pour la conservation d’experts irremplaçables. S’ils sont à l’extérieur, on mobilisera des efforts intenses pour les convaincre, puis les recruter dans des conditions suffisamment attractives. L’objectif est bien de miser sur une collaboration de long terme. Ces profils devront être motivés et régulièrement formés pour fournir une exécution de haut niveau. Cela suppose un investissement important en formation et en perspectives d’évolution de carrière, donc d’anticipation.

L’efficacité dans l’entreprise implique des missions claires et exécutables

L’exécution efficace des tâches impose de corréler 3 éléments :

  • Les compétences des individus
  • Le contenu de la mission
  • Les objectifs assignés

Ainsi, les rôles de chaque personne seront précisément détaillés et leurs périmètres d’action seront clairs. Ces opérations, fixées dans des documents complets et individualisés, pourront être revues et visées par toutes les personnes impliquées. Elles reflèteront les objectifs de l’entreprise et les modalités de leur application concrète au niveau du salarié. Elles seront des points de référence indiscutables en cas de débats ultérieurs.

Là intervient, naturellement, l’animation du management. Mais pas n’importe comment !

Les managers sont des clés du bon fonctionnement au sein d’une organisation efficace. Ils doivent avoir reçu une formation solide sur des techniques de management. Ils doivent aussi connaître les comportements efficients à activer pour la gestion sensible des hommes. Conscients de leur rôle de relais de la stratégie, ils sont

  • Respectueux de chacun,
  • Exigeants dans le cadre d’exécution des missions
  • Capables de flexibilité

Ils permettent un relationnel harmonieux entre les membres de leurs équipes. Ces responsables intermédiaires structurent littéralement l’organisation. La moindre erreur de personne, dans ces rôles, peut avoir des conséquences très dommageables. Cela explique pourquoi le choix des managers devra être réalisé avec un soin extrême si l’on vise l’efficacité dans une organisation.

Le choix stratégique de la bonne personne au bon poste

Lors d’un audit d’organisation chez un acteur international de la prospection minière, j’ai croisé un directeur de projet. Bien implanté dans son poste, il m’a relaté un épisode éclairant de sa carrière. Je retranscris ci-après :

Présent depuis huit ans dans l’entreprise, il s’acquittait de sa mission de directeur de projet avec sérieux. Il aimait pratiquer son métier. Son engagement était total et ses résultats exemplaires. Sa situation lui convenait parfaitement et la voir perdurer longtemps le satisfaisait pleinement. Son directeur de département, avec lequel il entretenait des relations cordiales, bénéficia d’une promotion dans le cadre normal de son évolution de carrière.

Dans cette entreprise, le promu nommait son remplaçant, c’était l’usage. La décision devait se prendre rapidement du fait d’un départ urgent. Notre directeur de projet, bien noté et particulièrement apprécié, fut désigné, sans surprise, pour ces nouvelles responsabilités. Son nouveau job consistait à encadrer une équipe de directeurs de projets comme lui, répartis en Amérique du Sud.

Une fois en poste, notre ex-directeur de projets, désormais manager de ses ex-collègues, affronta une difficulté inattendue : il ne se sentait pas fait pour ce rôle. Diriger l’équipe le mettait mal à l’aise. Et puis, s’astreindre à des reportings fastidieux, compléter des tableaux de bord, préparer et faire des présentations à des audiences critiques, tout cela lui pesait.

Aucun accompagnement n’avait été prévu pour l’aider à apprendre ce métier de manager. Cependant, conscient d’avoir été choisi parmi d’autres, il s’est tu et a encaissé les coups de cette épreuve humaine moralement pénible.

Au bout de 12 mois, notre homme était physiquement et nerveusement vidé. Son bilan était médiocre et son management, approximatif, avait déstabilisé le service. Il demanda à sa hiérarchie de retrouver son poste précédent. Heureusement, il obtint satisfaction et ce fut un soulagement.

Les décisions paresseuses bloquent l’efficacité dans l’entreprise

On a là une illustration frappante d’une décision prise trop rapidement, sans préparation, exempte de toute réflexion sur son bien-fondé. Ce sont souvent les processus internes, la tradition et les habitudes qui œuvrent à la place d’une réflexion professionnelle. Les conséquences possibles d’un mauvais casting ne sont pas anticipées. Les acteurs impliqués en font les frais.

Dans notre exemple, cette décision avait pourtant l’apparence d’un arbitrage éclairé par la connaissance des profils et la valeur de chacun au bénéfice de l’entreprise. Mais, prise par un dirigeant pressé, tourné sur ses priorités du moment, il s’agissait, au contraire d’une solution de facilité, étayée par l’image au premier degré d’un candidat adéquat et disponible.

L’anecdote se conclut par la reconnaissance, par le directeur promu, de sa légèreté en la matière. Il vécut cet acte de management manqué comme une leçon édifiante. Les relations de confiance entre lui et le chef de projet malheureux se sont encore renforcées par la suite.

Au-delà de ce récit, l’efficacité de groupe, pour exister et s’exprimer dans toutes ses dimensions, a besoin de ces quelques ingrédients :

  • Un management formé, exemplaire, engagé et à l’écoute
  • Une lecture directe et compréhensible de la stratégie par tous
  • Les bonnes personnes aux bons postes, au bon moment
  • Des prises de décision fondées sur une vision pragmatique de la réalité
  • Un désir partagé de succès collectif
  • Le respect total pour le client

Et chez vous, comment ça se passe ?

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