La solidarité est un élément essentiel pour une organisation d’entreprise performante.
Mais que vient faire la notion de solidarité dans le monde de l’entreprise où les ambitions personnelles (légitimes ?) la compétition interne tous azimuts (nécessaire ?) et le double langage (inévitable ?) sont des constantes ? S’agit-il de mobiliser les principes fondateurs des gens de bien, généreux et engagés envers autrui, sans autre attente en retour que le sentiment du devoir moral accompli ?
Quelle solidarité ?
C’est vrai. Une entreprise n’est pas une association caritative. Ses membres produisent, vendent, dégagent du CA et des profits. La solidarité active y participe et concerne tous les acteurs d’une société, de l’actionnaire au collaborateur novice. De quelle solidarité s’agit-il ? De celle qui amène naturellement à s’entraider, se soutenir, s’écouter, participer. Même quand le sujet est hors de notre périmètre d’intérêt ou de responsabilité. Même et surtout dans les situations délicates. C’est bien plus fort que le team spirit, artificiel et trop ponctuel. Cette solidarité-là soude, rassemble, emplit chacun d’un sentiment de plénitude et de confiance car on évoque là des choix émotionnels profonds.
Le contexte compte
Cette solidarité vécue va s’inscrire dans un contexte de stratégie connue et adoptée d’atteinte d’objectifs collectifs, de soutien de la démarche de cohérence au sein d’une société. Nous savons que la solidarité est une valeur cardinale. C’est aussi, pour une organisation se voulant performante, un comportement vertueux. Cependant, dans le contexte des crises économique, morale, épidémiologique actuelles, avons-nous du temps pour être solidaire au travail, les cerveaux ont-ils suffisamment de souplesse pour susciter des comportements altruistes en environnement sous pression ?
La solidarité faciale
La solidarité faciale, souvent présente dans des discours, pleine d’enthousiasme et de bons sentiments, n’engage à rien si les managers l’ignorent et si les équipes ne s’en emparent pas. Etant seulement théorique, elle reste inapplicable dans la vie quotidienne et son absence freine la performance. En effet, des individus agissant pour eux-mêmes ont une capacité d’action forcément limitée. Prenons pour exemple les relations entre un service commercial et ses collègues du marketing. C’est un grand classique car il ne se dément pas d’une génération de professionnels à l’autre.
Le marketing vu par les ventes
Classiquement, un vendeur s’attendra à un accompagnement concret de la part du service marketing dans ses démarches en clientèle. Il critiquera ou se félicitera des moyens mis à sa disposition. Il les dédaignera ou les exploitera selon les cas.
Mais il méconnaît les techniques utilisées. Il lui est difficile d’évaluer le niveau de créativité des programmes créés pour susciter l’intérêt du marché. Il ignore comment ils sont pensés, élaborés, diffusés ou comment les opportunités d’affaires issues du marketing sont initiées. Il aura, peut-être, une vague idée des efforts humains et techniques déployés pour respecter les budgets, contourner ou surmonter des obstacles politiques internes. Il ne comprendra pas comment une efficacité visible a été rendue possible avec, souvent, des moyens limités.
Exemple en réponse : les ventes vues par le marketing
De la même façon, une équipe marketing active va déplorer le peu de cas que les commerciaux font des moyens et informations mobilisés pour eux. Elle s’en désole et se plaint de l’inattention dont elle est l’objet.
Mais, elle connait peu la difficulté d’un travail commercial avec ses enjeux, ses délais d’exécution, la pression sur le CA ou le nombre de signatures de contrats. Elle considère, opinion trop souvent partagée, que les commerciaux sont d’arrogants opportunistes. Ils surfant sans vergogne sur les compétences de leurs collègues pour profiter seuls de la visibilité positive d’une réussite commerciale.
Elle ignore ce que signifie, pour une population commerciale confrontée directement au marché concurrentiel, de gérer la pression du chiffre, négocier avec des clients versatiles, tenter d’accélérer des délais incompressibles, anticiper des reports de signature et l’expliquer de façon claire à des chefs des ventes sous pression, sourds aux informations désagréables.
Les autres services et conséquences
Ce nombrilisme ravageur se remarque partout : entre les ventes et la technique, les RH et la finance, le comité de direction et le management intermédiaire et entre chacun de ces services. On l’observe au travers des relations tendues entre des managers en compétition pour une plus grande reconnaissance. On le constate lors d’événements considérés, dans la culture d’entreprise, comme des échecs : investissement non rentable, perte d’un contrat espéré, implication de responsables dans une décision aux conséquences fâcheuses…
Les collègues cherchent à s’y soustraire à tout prix. Ils se désolidarisent ostensiblement des cibles désignées, plus connues sous le sobriquet de « fusibles ». Ils savent que ce n’est pas très glorieux. Ils pourraient faire autrement, mais ils ne le font pas, ou si rarement. Des codes comportementaux tacites, très courants et puissants, privilégient l’évitement, le réflexe d’autoprotection et donc, la sanction au détriment du bouc émissaire. La solidarité dans l’entreprise ?
On en est loin. Et pourtant, un comportement solidaire entre les services et les personnes induit, de façon certaine, une progression significative des résultats.
Concrètement, la solidarité dans l’entreprise ?
Voici, à titre d’exemple, 2 leviers pragmatiques pour que la solidarité puisse devenir une réalité de tous les jours et qu’elle participe à des résultats en accélération :
La compréhension des maillons de la chaîne de valeurs
Une solidarité réelle passe par une compréhension, par tous, de la totalité de la chaîne de création de valeur dans l’entreprise (créer, produire, vendre, stocker, innover, gérer etc.) au travers de la bonne connaissance mutuelle des différents services impliqués par la production et la diffusion de cette valeur.
On constate très souvent une indifférence marquée des métiers de l’entreprise les uns pour les autres. C’est ce changement là qu’il faut opérer. S’il est sincèrement voulu, il est facile à réaliser moyennant un peu de temps et une adhésion réfléchie des équipes. Pour reprendre l’exemple évoqué plus haut, les commerciaux pourraient passer du temps avec l’équipe marketing et vice versa.
Chacun appréhenderait ainsi le fond du métier de l’autre et en serait plus efficace car bien mieux informé. L’empathie ainsi créée permettrait des réactions plus rapides aux aléas des affaires et les gains obtenus seraient supérieurs.
Parler un langage commun
Le langage étant l’un des outils culturels capable de structurer le monde de celui qui l’emploie, on imagine aisément comment se dressent les obstacles à une communication claire quand les langages séparent. Pour travailler efficacement ensemble, il faut se comprendre en donnant le même sens aux mots employés et aux concepts liés à des missions.
La racine d’une communication difficile entre services ou personnes tient systématiquement à l’incompréhension ou pire, à l’indifférence au langage de l’autre. Un vocabulaire spécifique, utilisé au sein d’un service, permet une efficacité accrue entre ses membres mais inclut le risque de fermeture relative aux échanges avec l’extérieur.
Pour activer la solidarité entre tous les membres d’une entreprise, une révision des habitudes de langage pratiquées habituellement par les divers services devra être effectuée. Le travail en mode projet, transversal et multi compétences est un bon vecteur pour y parvenir sans heurts.
D’autres leviers actionnables
Former tous les managers de l’entreprise aux méthodes modernes de management
Instituer un système de parrainage des plus anciens avec les plus jeunes
Systématiser le travail en mode projet
Autonomiser le management intermédiaire
Élaborer l’alignement organisationnel (horizontal, vertical, matriciel)
Ne laisser personne à la traîne (pas de dernier !
Célébrer les succès, apprendre des échecs, ensemble.
Et d’autres encore…
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