La performance commerciale

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Auteur

Patrick Probonas

Date de publication

10/19/2020

La notion de performance commerciale et ce qu’elle implique semble être une évidence dans l’entreprise. Tout le monde voit de quoi il s’agit. Pourtant, on observe que cette évidence partagée est le fruit d’une habitude de pensée. Elle tend à banaliser les défis de la performance commerciale. Elle tente de noyer le geste de la vente, pratiqué au cours de missions très complexes, dans le grand bassin de la routine quotidienne de la vie des entreprises. C’est en général le cas pour tous ces termes rabâchés dans la sphère professionnelle et devenus des fourre-tout sémantiques comme « efficacité, communication, résultats, projet, ambition etc… » Leurs interprétations sont tellement nombreuses qu’elles aboutissent le plus souvent à une totale absence de sens, en particulier pour des organisateurs et managers, censés les définir, les transmettre, les pratiquer. Pour évoquer la performance commerciale, revenons à sa racine : le mot performance est issu de parformer, qui signifie accomplir. Dans un groupe où les membres travaillent ensemble pour atteindre un même objectif, la performance peut être définie comme :

Le résultat d’actions individuelles ou collectives d’exception, mesurables, vérifiables, réalisées dans des conditions difficiles, atteignant ou dépassant les objectifs assignés et participant à l’amélioration visible de la vie d’un individu ou d’un groupe.

A la performance s’ajoute l’action commerciale. Elle met en jeu des relations où se jouent la recherche d’un équilibre profitable à toutes les parties dans le but d’échanger des biens, des services ou des informations. Dans ce cadre, toutes les capacités intellectuelles utiles sont activées, toute la profondeur de la trame émotionnelle des acteurs (commercial, client) agit pour stabiliser des énergies souvent contradictoires. (Gagner, servir, se protéger, aider…) On peut affirmer que La performance commerciale en entreprise impose une prise en compte sérieuse de vecteurs d’actions tels que : o La stratégie (vision, anticipation, projection) o L’organisation (plans, moyens, méthodes) o L’engagement (motivation, professionnalisme, sens de l’action)

Les cartes sont rebattues

Les conditions de réalisation des performances commerciales B2B ont radicalement changé au cours de la dernière décennie. Les entreprises évoluent dans un monde économique réel en perpétuel changement. L’économie virtuelle, boursière, qui se rapproche bien plus de prises de paris sur un hippodrome que de la vie des entreprises et, surtout, de ceux qui y vivent, peut aussi avoir une influence perturbante. Il n’y a pas UN changement global et massif, mais DES évolutions permanentes dans tous les domaines, mus par des moteurs nombreux et disparates. Une idée considérée comme géniale à un instant T peut être ringardisée à T+n, n étant la variable de délai pour la mise au placard. On assiste, sur le plan sociétal et, plus précisément, dans le monde des affaires en général, à des comportements profondément modifiés au cours des 20 dernières années. Par exemple, l’irruption roborative, bien qu’anxiogène, du changement climatique, bouscule les fondamentaux énergétiques du modèle occidental et pousse les décideurs à revoir leurs plans pour l’avenir sous la pression d’une opinion publique en attente de solutions. L’explosion de moyens électroniques de mise en relation (smartphones, réseaux…) d’utilisation intuitive, a provoqué un accès sans précédent à une information de plus en plus fine, détaillée, souvent multi forme. Le commerce change de nature, accélérant la survenue d’offres de biens et de services en nombre illimitées, disponibles, financièrement accessibles. Les cartes relationnelles entre les acteurs économiques impliqués sont rebattues sans cesse dans un flux de transformation continue. Ce bouleversement culturel et technologique, relié à un environnement social aux repères renouvelés, sert de matrice à de nouveaux usages, en particulier dans la relation d’affaires. Les entreprises sont soumises à des contraintes plus fortes : o L’obligation d’un positionnement très différencié o L’adaptation de leurs processus aux nouvelles conditions du marché o Le besoin vital d’un impact mesurable du discours commercial o L’utilisation d’outils performants pour la gestion et l’usage de la donnée client Une stratégie claire et lisible ne suffit plus. Elle doit prouver en permanence sa flexibilité, sa pertinence et sa solidité à l’épreuve de la réalité, principe auquel on ne peut plus échapper. Tous ces sujets sont des défis pour les entreprises et entrepreneurs d’aujourd’hui. Ils doivent être relevés ensemble et passer par une phase incontournable de transformation des critères anciens, encore visiblement trop présents dans un monde devenu terriblement imprévisible.

L’acte commercial performant est un métier

A la lumière de notre propos, la performance commerciale implique que l’acte de vente devient un métier à part entière. Ou plutôt des métiers, caractérisés par le type de d’offre, l’envergure nationale ou internationale des activités, le type et le rythme des cycles de vente. Un métier implique du professionnalisme, donc des comportements spécifiques, mais aussi des méthodes et des techniques, apprises et soumises à l’épreuve de l’expérience vécue. L’époque où le talent d’un individu seul, ses intuitions et son entregent, pouvaient suffire pour obtenir des résultats commerciaux probants, est largement révolue. A présent, face à des acheteurs autonomes, à des réseaux sociaux hyper développés, à des intervenants nouveaux et à des références comportementales en évolution rapide, l’action commerciale implique la mise en œuvre des meilleures pratiques actuelles et une rigueur sans faille dans leur application.

Un cycle de vente en 7 étapes clés

Préparation, prospection, détection, qualification, démonstration, négociation, closing

C’est le modèle classique d’un processus. Il sert à sérier les étapes, hiérarchiser les tâches et distribuer les rôles, dans l’ordre, à une foule de gens. Evitons aussi les excès de zèle en cette matière. Dans notre réflexion sur la performance commerciale, les processus vont s’adapter aux nouveaux usages, ils seront adaptables. La préparation des actions de production d’affaires, dans les conditions de marché décrites plus haut, induit des changements d’organisation : les équipes de ventes sont désormais composées de commerciaux ET de marketeurs. C’est ensemble qu’ils vont périmétrer leur terrain de jeu : o Sélection des données clients et prospects o Segmentation du marché en fonction des tactiques retenues o Définition du profil des cibles et des opérations de promotion et de relance. Cette préparation prendra en compte les objectifs quantitatifs de l’entreprise pour l’année fiscale. De ce fait, la responsabilité des programmes pourra être partagée entre les services commerciaux et marketing pour des sujets aussi importants que la définition du choix du terrain d’action ou le positionnement des discours et des offres pour chaque entité.

La performance commerciale par une autre répartition des rôles

L’intensité des 3 premières étapes du cycle de vente présenté est élevée. Elles demandent un investissement en temps et en énergie importants. Les équipes commerciales, rémunérées pour convaincre, négocier et signer des affaires, seront mal utilisées si leur participation aux phases de défrichage du marché les implique trop. Dans ce cas, une prise en charge de ces opérations par le marketing permettra d’initier des opérations de prospection digitale par exemple, utiles pour une sélection rapide de contacts sensibles au discours de vente. Les projets nouveaux détectés via des actions d’attraction, sont traités soit immédiatement, soit sur le temps de la maturité des projets. Pour ce faire, la technologie propose des outils digitaux nombreux et efficaces pour susciter l’intérêt d’un acheteur, lancer des invitations, provoquer des rencontres et automatiser des contacts créatifs pour des besoins sur mesure. Ils seront transmis au bon moment aux forces commerciales qui assumeront les 4 autres tâches de la suite ci-dessus. La phase de qualification pourra bénéficier d’un recouvrement des actions entre la prospection en amont et le commercial de terrain, en fonction de l’avancement d’un projet et l’opportunité d’un contact physique avec le prospect. Les équipes commerciales entrent en jeu lors du contact avec les prospects qualifiés en phase d’engagement et de conversion. Le service commercial, dépositaire de « prospects » transmis par le service marketing, va confirmer ou infirmer leur intérêt, les qualifier de manière plus détaillée puis, si l’opportunité se révèle, lancer les opérations de conversion du prospect en projet. Dans le cadre de leurs attributions, les commerciaux exécuteront la démonstration de la valeur de l’offre, se frotteront à la concurrence, entameront les négociations si nécessaire puis finiront par les opérations de conclusion d’affaire.

La performance commerciale et ses nouveaux défis

Ces opérations très concrètes, bien exécutées, participent pleinement de la performance commerciale du 21ème siècle. Pour que ce modèle devienne réalité, des conditions d’exécution doivent s’appliquer et c’est là que les choses se corsent : Nous parlons de transformation des usages où chacun accepte de sortir de sa zone de confort sans savoir, au début de l’expérience, ce qu’il va y gagner. Pour y parvenir, des explications sont nécessaires, un coaching opérationnel et des formations idoines conduiront à une implémentation orchestrée en commun et en conscience. Insistons sur le fait qu’un accompagnement à ces types de changements reste incontournable. Nous devons évoquer ici la « signature culturelle de cohérence et de solidarité qui identifie une entreprise » Il est sain de donner vie à cette approche en introduisant, dans le quotidien de ces professionnels de la vente et du marketing, les indicateurs de productivité communs qui feront office de liant, de soudure naturelle. Parmi ces indicateurs figurent les classiques mesures de réalisation : la courbe ascendante du nombre des projets nouveaux, la proportion des projets transmissibles aux ventes, le nombre de projets convertibles en contrats signés etc… D’autres indicateurs, moins utilisés et pourtant puissants devront intervenir : La qualité relationnelle, l’usage d’un langage commun, le partage de toutes les informations, l’engagement individuel pour la réussite collective, la valorisation des individus, la reconnaissance du succès, la capacité à se projeter dans l’avenir avec le groupe etc… C’est en mêlant ces 2 familles d’indicateurs, analysés et compris avec clairvoyance, que la performance commerciale moderne, enfin libérée, pourra s’exprimer dans toute sa réalité.

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